Giacomo DIANA
Giacomo Diana
« Suite à mon regard de responsable infirmier de la pédopsychiatrie, je me rends compte que les enfants de la pédopsychiatrie changent: nous sommes de plus en plus confrontés aux troubles de comportement, à des soucis de plus en plus liés à l'éducationnel. Les enfants admis sont aussi de plus en plus jeunes et l'outil relationnel est rare. Entrer en relation avec l'autre avec respect est une valeur à inculquer dès le plus jeune âge. Même si j'ai conscience que ce qui arrive à cet enfant est sans doute lié aux premières années de sa vie, qu'il n'est que l'expression d'un mal-être vécu, de violence intra-familiale, de maladresse de l'adulte ...
Malgré l'utilisation de quelques outils, les infirmiers ou éducateurs de la pédopsychiatrie se heurtent d'emblée à un problème méthodologique: l'objet, le jouet transactionnel n'est pas "un être", sans interaction, comment créer la relation?
L'animal est cet autre avec une importance car il vit. S'occuper de lui inculque à l'enfant la capacité de s'organiser, de donner à manger, de prendre soin, d'échanger, de communiquer et surtout de l'aimer. L'enfant noue des relations qui peuvent être des modèles stables. Nous pouvons rendre cet enfant responsable et surtout remettre du sens à notre prise en charge. Je peux qualifier cela comme nouvel "être thérapeutique", car les temps ne sont pas si lointains où le respect de l'animal n'existait que si peu. Cet animal nous permet d'observer la façon dont l'enfant construit son lien aux autres: l'analyse du lien social en lien avec son éducation.
Ancré dans une recherche d'amélioration continue de nos soins, l'animal: le chien, le cheval nous apportent des réponses concrètes et est un soutien psychologique de l'enfant. »
Vanessa HENRY
Vanessa Henry
« La psychologie de l'enfance a ignoré l'importance de l'animal dans la vie de l'enfant comme d'autres actions bénéfiques variées ont pu être mises de côté ou non investiguées. Toutefois, certains auteurs se sont penchés il y a déjà de nombreuses années sur le rôle symbolique de l'animal pour l'enfant. Que celui-ci soit en peluche ou qu'il s'agisse d'un animal vivant.
La prise en charge de l'enfant hospitalisé a fortement évolué ces dernières années et ce dans plusieurs domaines. Toute une série d'activités ayant comme objectif l'amélioration de la qualité de vie des enfants hospitalisés ont été mises en place, dont la cyno-thérapie.
L'arrivée des animaux sur le lieu d'hospitalisation indique un regard neuf et une attitude d'ouverture à des activités variées dans un objectif de bien-être pour l'enfant. Que ces activités aient une visée thérapeutique ou tout simplement une fin ludique et relaxante.
Il nous semble donc en effet qu'il existe une évolution positive dans la perception de l'utilité que peuvent avoir les animaux dans le travail avec les enfants. »
J-M GAUTHIER
J-M Gauthier
Le chien à l’hôpital pour quoi faire? Les raisons d’une étrange idée.
Il suffit d’y penser quelques instants pour se rendre compte que l’univers de l’enfant est peuplé d’animaux en tous genres. Qu’on songe aux histoires et aux contes que nous leur racontons comme au plaisir spontané qu’ils manifestent à la rencontre d’un animal, le monde réel comme imaginaire des enfants est gros d’une sorte de bestiaire où il aime se retrouver. Il y côtoie aussi bien des animaux fantastiques ou féériques comme il aime regarder un chat, un chien ou des oiseaux.
Je pense souvent à ces enfants qui, sachant à peine marcher, s’élancent sur des places publiques en cherchant à s’approcher des pigeons. Et l’envol de ceux-ci ne semble pas les décourager, car à chaque fois, ils retournent de bon cœur à l’aventure qui les déçoit à nouveau. Les adultes, de ce point de vue ne feraient que suivre une sorte de penchant naturel des petits et quand nous leur offrons des peluches et autres nounours, il semble tout naturel que ce soit à nouveau au monde animal qu’elles destinent le cœur et les pensées des enfants.
Il est intéressant de s’interroger sur les raisons de ces conduites qui restent le plus souvent aussi spontanées qu’irréfléchies, pour ne pas dire inconscientes. C’est tout simplement que le chien utilise le canal de communication privilégié par les enfants, celui de l’émotion et du corps (les deux aspects sont indissolublement associés). Pour le bébé il s’agit même du canal exclusif d’échange avec ses proches. Dans la vie de tous les jours, ces formes de communication n’ont pas disparu même si la langage a pris toute son importance : nos gestes, attitudes, mimiques et intonations de voix indiquent aux autres notre état émotionnel.
Ces formes d’échanges sont un acquis de l’Evolution des espèces et appartient en propre aux mammifères. Comme nous, le chien appartient à cette même espère animale. Comme tous les animaux de cette sorte, il communique par le corps par ses attitudes et ses vocalisations, par son odeur aussi même si l’homme est devenu moins sensible à cette dimension ! Comme le cheval, autre conquête de nos ancêtres, le chien est un animal social, il est donc très sensible et attentif à l’état émotionnel de ses congénères. Il a été choisi par l’homme comme animal de compagnie en raison justement de ses qualités sociales. Au fils des sélections et des évolutions, nous l’avons rendu de plus en plus compétent dans le décodage de nos émotions. C’est ainsi qu’on peut penser qu’une fois habitué à son environnement, il comprend les pensées de son maître grâce aux attitudes corporelles de celui-ci. C’est de cette façon qu’il est proche de l’enfant qui, avant de comprendre le sens des paroles est attentif aux gestes de son entourage.
Il y a ainsi une sorte de familiarité naturelle entre l’enfant et le chien ; la même importance accordée au regard et aux rythmes des échanges comme aux postures corporelles.
On ne peut que se féliciter du fait que des soignants du C.H.R. de Liège aient eu la bonne idée, un peu révolutionnaire, d’introduire des chiens dans l’hôpital, dans ce lieu stérile et réservé à des activité qui nécessitent sérieux et précision. Cette idée qui pourrait, à priori, paraître étrange permet à l’enfant de rétablir une familiarité, sa familiarité dans un monde hospitalier qui ne lui appartient pas. On peut, à juste titre, tenter d’humaniser les soins, de traiter les enfants avec douceur et compassion, mais l’hôpital ne sera jamais un lieu familier pour celui-ci. En raison surtout du fait que son corps (qui est le lieu privilégié de sa communication) est mis en question examiné, transformé ; les rythmes de la vie quotidienne ont disparu tout à coup, il doit se vêtir et se dévêtir devant des inconnus. On peut bien sûr, s’y attendre, y avoir été préparé mais le vivre reste, à tous les coups, une expérience nouvelle et pleine d’étrangetés qui deviennent vite menaçantes. Rencontrer un chien dans cet univers inconnu permet à l’enfant de se recréer pour quelques temps une familiarité qui lui donne un répit très apprécié et quelques moments qui lui appartiennent en propre.
A l’hôpital, moi aussi, j’aime apercevoir ces chiens sur mon chemin. Et les suivre, parfois, me donne tout à coup le sentiment que ma route, au milieu de ces couloirs, est en train de changer, que je suis en route pour autre chose et que ma précipitation habituelle peut céder ; une certaine gaité accompagne soudain mon pas. J’aime rencontrer ces toutous dont les longs poils recouvrent les yeux, à la tête dodelinante, ils suivent paisibles leurs maîtres comme occupés par une promenade d’un autre temps, celui de nous tous depuis fort longtemps.
Très simplement, et souvent au milieu de moments difficiles, ils nous indiquent et nous invitent à un moment de poésie.